L'âge de la majorité - Septembre 2004
L'AGE DE LA MAJORITÉL'âge de la
"majorité" (moment où une personne est considérée comme capable
d'exercer ses droits sans l'aide de ses parents ou de ses tuteurs) a
varié suivant les époques, suivant le sexe des individus concernés
et suivant sa finalité (capacité à se marier, capacité à jouir de
ses droits civiques et politiques...). Chez les Romains, où l'homme
était pubère à 14 ans et la femme à 12 ans, les législateurs avaient
prolongé la période d'incapacité
au-delà de la puberté jusqu'à 25 ans.
En FRANCE, malgré la diversité des coutumes, l'influence du droit
romain se fit largement sentir, surtout à partir du XVIIe siècle. Il
était en général admis que "la pleine capacité civile n'était
atteinte qu'à 25 ans" (Arrêtés de M. le P.P. de LAMOIGNON - 1702).
Mais il y eu des exceptions : Toute personne "née" en NORMANDIE
était réputée majeure à 20 ans accomplis (Placitez du Parlement de
ROUEN de 1666 - article 38).
La Révolution, favorable aux jeunes générations, abaissa l'âge de la
majorité à 21 ans (loi du 20 septembre 1792).
Le Code Civil Napoléonien (loi du 30 ventôse An XII) conserva le
même âge et il fallu attendre la Ve République et la loi du 5
juillet 1974 pour que la majorité soit acquise à 18 ans.
LE MARIAGE ET L'AGE DE LA MAJORITÉ
Le mariage étant un engagement des plus importants qu'un homme et
une femme
prennent au cours de leur vie, la loi a souvent exigé que le
consentement
des futurs époux soit corroboré par la volonté familiale.
En droit romain, la puissance paternelle durait autant que la vie du
père.
Mais il se fit, dans l'Empire romain même, une lente réaction à ce
principe
à mesure que les traditions romaines s'affaiblissaient : ainsi on
permit aux
enfants de famille de se marier sans le consentement de leurs
parents. Cette
réaction, commencée sous les Empereurs païens, s'acheva à la fin du
Moyen
Age sous l'influence de l'Église Catholique.
Les docteurs en droit canon avaient adopté très tôt la doctrine de
la
validité du mariage sans l'assentiment du père de famille et le
Concile de
TRENTE rendit définitive cette doctrine dans sa XXIVe session en
frappant
d'anathème les partisans de la nullité de ces mariages. Une tendance
constante du droit canonique fut toujours d'assurer la liberté
totale du
mariage, ce qui ne manqua pas d'entraîner des conflits entre l'Église
et les
pouvoirs temporels. En France, les Parlements n'acceptèrent pas
cette
décision de l'Église et, pour les mariages, maintinrent la nécessité
du
consentement des parents. Toutefois, sauf quelques cas isolés, ils
ne
conservèrent pas intact le système romain et prirent un moyen terme
: les
mineurs de 25 ans furent seuls astreints à obtenir le consentement
de leurs
parents, les majeurs étant seulement tenus à obtenir leur "conseil",
et, en
cas de refus, ils pouvaient passer outre.
Les enfants qui se passaient du consentement de leurs parents se
mariaient
ordinairement en secret. De là le nom que l'on donna à ces mariages
de
"mariages clandestins". Les "mariages clandestins" devenant de plus
en plus
fréquents, les Rois de FRANCE établirent contre eux une législation
de plus
en plus sévère. Un édit de HENRI II, daté de février 1556, permit
aux
parents "d'exhéréder" leurs enfants mariés sans leur consentement.
Une ordonnance de 1639 déclara ces derniers déchus de plein droit de
tous
leurs droits successoraux et de tous les avantages provenant de
testaments
ainsi que de leur contrat de mariage. D'autres part, certains
Parlements
assimilèrent les "mariages clandestins" au rapt et leur en
appliquèrent les
peines. Mais, malgré les efforts de certains juristes laïcs tendant
à faire
déclarer nuls et sans effets les "mariages clandestins", la
jurisprudence
civile n'osa jamais aller plus loin : il n'appartenait qu'à l'Église
et à
elle seule de prononcer les annulations.
Le Code Civil Napoléonien posa, pour le mariage, deux règles :
Conformément à l'ancienne tradition coutumière, il établit une
majorité
spéciale, la "majorité matrimoniale", distincte de la "majorité
ordinaire" :
les garçons avaient besoin du consentement de leurs parents jusqu'à
25 ans
et, tant qu'ils n'avaient pas atteint cet âge, ils étaient réputés
"mineurs"
quant au mariage. Pour les filles, au contraire, la "majorité
matrimoniale"
coïncidait avec la "majorité civile", soit 21 ans. Il a fallu
attendre la
loi du 21 juin 1907 pour faire cesser cette disparité.
Si les futurs époux qui avaient la "majorité matrimoniale"
pouvaient se
marier sans autorisation parentale, ils n'en étaient pas moins tenus
par la
loi de demander le "conseil" de leurs parents ou de leurs grands
parents,
ou, à défaut, de leur notifier leur projet de mariage par des "actes
respectueux".
Cette formalité des "actes respectueux" consistait pour l'enfant à
adresser
par trois fois à ses ascendants une "sommation", non par voie
d'huissier
mais par notaire, qui devait être rédigée en termes "respectueux",
d'où son
nom. Si l'ascendant persistait dans son opposition, son refus
n'empêchait
pas le mariage : il entraînait seulement un retard pour la
célébration du
mariage d'un mois pour chaque acte. Le législateur espérait par ce
moyen
empêcher des unions hâtives en donnant aux enfants, dominés par une
passion
peut être passagère, le temps de réfléchir.
Mais ces "actes respectueux" ne produisaient pas toujours, dans la
pratique,
l'effet attendu. Ils avaient souvent pour résultat d'exaspérer des
haines de
famille par les lenteurs et les scènes qu'ils provoquaient et
d'imposer aux
notaires des missions désagréables.
La loi du 20 juin 1907 remplaça "l'acte respectueux" par la
"notification du
projet de mariage", laquelle, suite aux aménagements prévus par les
lois des
28 avril 1922 et 17 juillet 1927, ne fût plus nécessaire que dans un
nombre
limité de cas. Au fil des ans, les conceptions individualistes
modernes
avaient vidé peu à peu le système mis en place par le Code
Napoléonien de
ses exigences d'origine. La loi du 2 février 1933 qui a rendu
totalement
libres les enfants majeurs de se marier sans consentement parental
fit
disparaître ces vestiges juridiques.
Il est à noter que, à toutes les époques, la présence des parents à
la
célébration du mariage, qu'il soit religieux ou civil, valait
consentement
exprès.
En résumé, en FRANCE, pour qu'un mariage sans consentement parental
exprès
soit valable, il fallait :
de 1556 au 19 septembre 1792, que l'époux ait plus de trente ans et l'épouse plus de vingt cinq ans,
du 20 septembre 1792 au 29 ventôse An XII, que l'époux et l'épouse aient chacun plus de vingt et un ans,
du 30 ventôse An XII au 20 juin 1907, que l'époux ait plus de vingt cinq ans et l'épouse plus de vingt et un ans,
du 21 juin 1907 au 4 juillet 1974, que l'époux et l'épouse aient chacun plus de vingt et un ans,
et, depuis le 5 juillet 1974, que l'époux et l'épouse aient chacun plus de dix huit ans.
MAJORITÉ MATRIMONIAL :
Édit de Blois 1556 avait fixé cette majorité à 30 ans pour les
hommes et 25
ans^pour les femmes. en-deça autorisation obligatoire des parents,
au-delà
par respect on sollicitait les parents. Article 41 de l'ordonnance
de Blois
mai 1579 confirme ces dispositions. La Révolution fixa ensuite la
majorité à
25 ans pour les hommes et 21 pour les femmes en 1792 puis à partir
de 1803
ce fut 21 ans pour les deux jusqu'en 1974.
AGE DE LA PUBERTÉ LÉGAL
De tout temps, la puberté a été une condition au mariage imposée par
la
nature et reprise, tant par le droit canon que par la loi civile.
jusqu'à la loi du 29 septembre 1792, l'âge minimum pour le mariage était de douze ans pour les filles et de quatorze ans pour les garçons,
la période révolutionnaire (du 29 septembre 1792 au 29 ventôse An XII)le porta respectivement à treize ans et à quinze ans,
depuis le 30 ventôse An XII, l'âge de la "puberté légale" n'a
pas changé: il est de quinze ans pour les filles et de dix huit ans pour les
garçons.
L'Eglise, sous l'Ancien Régime, et l'État, depuis 1792, se sont
toujours
réservé le droit d'accorder des dispenses pour circonstances
exceptionnelles.
SOURCES
"TRAITÉ DE DROIT CIVIL, d'après Le TRAITÉ de PLANIOL" par Georges
RIPERT et
Jean BOULANGER (PARIS - 1956).